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fois. L’Océan lui-même, plus tranquille et plus propice, semblait s’avouer vaincu.

Mais la plus formidable, et en même temps la dernière ligne des Gaulois, fut celle où l’on vit entrer à la fois les Arvernes et les Bituriges, les Carnutes et les Séquanes. Ils y furent entraînés par un homme dont la stature, les armes et la valeur répandaient l’épouvante, et dont le nom même avait quelque chose de terrible ; c’était Vercingétorix. Dans les jours de fêtes et dans les conciliabules, pour lesquels les Gaulois se réunissaient en foule dans les bois sacrés, il les excitait par des discours pleins d’audace à reconquérir leur légitime et ancienne liberté. César était alors absent, et faisait des levées à Ravenne. L’hiver avait accru la hauteur des Alpes et les Barbares pensaient que le passage nous en était fermé. Mais, à la première nouvelle de ces mouvements, César, toujours heureux dans sa témérité, franchit des montagnes jusqu’alors inaccessibles, des routes et des neiges que nul n’avait foulées, et pénètre tout à coup dans la Gaule avec quelques troupes armées à la légère. Il rassemble ses légions distribuées dans des quartiers d’hiver éloignés, et se montre au milieu de la Gaule avant qu’on le crût sur les frontières. Alors il attaque les villes mêmes qui avaient suscité la guerre ; et Avaricum succombe avec ses quarante mille défenseurs. Alexia, malgré les efforts de deux cent cinquante mille Gaulois, est détruite de fond en comble. C’est surtout sur Gergovie des Arvernes que tombe tout le poids de la guerre. Elle était défendue par quatre-vingt mille combattants, par ses murailles, sa forteresse et ses rochers escarpés. César entoure cette grande ville d’un fossé, dans lequel il détourne la rivière qui l’arrose, d’un long retranchement bien palissadé et flanqué de dix-huit tours, et il commence par l’affamer. L’ennemi ose cependant tenter des sorties, mais il trouve la mort dans la tranchée sous les glaives et les pieux de nos soldats ; enfin ils sont forcés de se rendre. Leur roi lui-même, le plus bel ornement de la victoire, vient en suppliant dans le camp romain ; il jette alors aux pieds de César les harnais de son cheval et ses armes : « C’en est fait, lui dit-il ; ton courage est supérieur au mien ; tu as vaincu. »

XII. — Guerre des Parthes. — (An de R. 699.) — Tandis que, par les armes de César, le peuple romain soumet les Gaulois au septentrion, il reçoit, dans l’Orient, une cruelle blessure de la main des Parthes. Nous ne pouvons toutefois nous plaindre de la fortune ; cette consolation manque à notre malheur. La cupidité du consul Crassus, qui, malgré les dieux et les hommes, voulait s’assouvir de l’or des Parthes, fut punie par le massacre de onze légions, et par la perte de sa propre vie. Le tribun du peuple Métellus, au moment où ce général partait, l’avait dévoué aux divinités infernales (25). Lorsque l’armée traversait Zeugma[1], ses enseignes, emportées par un tourbillon subit, furent englouties dans l’Euphrate. Crassus campait à Nicéphorium[2], quand des ambassadeurs envoyés par le roi Orode, vinrent lui rappeler les traités conclus avec Pompée et Sylla. Affamé des trésors de ce prince, il ne daigna pas même imaginer un prétexte pour colorer son in-

  1. Ville de Syrie, près de l’Euphrate.
  2. Ville de Mésopotamie, située sur la rive orientale de l’Euphrate.