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Que doit-on le plus admirer dans cette victoire ? la rapidité ? quarante jours suffirent pour nous la donner ; le bonheur ? elle ne coûta pas même un seul vaisseau ; la durée de ses résultats ? les pirates furent détruits sans retour.

VIII. — Guerre de Crète. — (An de R. 679-685.) Si nous voulons bien reconnaître la vérité, nous avons fait la guerre de Crète, par le seul désir de vaincre cette île célèbre. Elle semblait avoir favorisé Mithridate ; on décida de s’en venger par les armes. Marcus Antonius l’envahit le premier, avec un si grand espoir et une si ferme assurance de la victoire qu’il portait sur sa flotte plus de chaînes que d’armes. Il fut bientôt puni de sa folle témérité : les ennemis lui enlevèrent la plus grande partie de ses vaisseaux ; ils attachèrent et pendirent les corps des prisonniers aux antennes et aux cordages ; et, déployant toutes leurs voiles, ils cinglèrent, comme en triomphe, vers les ports de la Crète. Plus tard, Métellus porta la flamme et le fer par toute leur île, on les enferma dans leurs châteaux et dans leurs places fortes, telles que Gnosse, Érythrée et Cydonie[1], la mère des villes, ainsi que l’appellent les Grecs. Il traitait si cruellement les prisonniers que la plupart des Crétois mirent fin à leurs jours par le poison, et que les autres firent porter leur soumission à Pompée absent. Ce général, alors occupé en Asie, leur envoya Antonius, son préfet, et se rendit illustre jusque dans la province d’un autre. Métellus ne s’en montra que plus ardent à exercer contre les Crétois les droits du vainqueur. Après avoir défait Lasthène et Panarès, chefs des Cydoniens, il revint triomphant à Rome. Il ne remporta néanmoins d’une si fameuse campagne que le surnom de Crétique.

IX. — Guerre contre les îles Baléares. — (An de Rome 650.) La famille de Métellus le Macédonique était en quelque sorte habituée à tirer ses noms des guerres qu’elle faisait. L’un des fils de ce Romain ayant été surnommé le Crétique, un autre ne tarda pas à être appelé le Baléarique.

Les insulaires des Baléares infestaient alors la mer de leur piraterie forcenée. On doit s’étonner de voir ces hommes farouches et sauvages oser seulement la contempler du haut de leurs rochers. Toutefois, montés sur de frêles bateaux, ils étaient devenus, par leurs attaques soudaines, la terreur de ceux qui naviguaient près de leurs îles. Ayant aperçu la flotte romaine qui, de la haute mer, cinglait vers eux, ils la regardent comme une proie, et poussent l’audace jusqu’à l’assaillir. Du premier choc, ils la couvrent d’une grêle effroyable de pierres et de cailloux. Chacun d’eux combat avec trois frondes. Faut-il s’étonner que leurs coups soient sûrs, quand c’est, chez cette nation, la seule arme et l’unique exercice dès l’âge le plus tendre ? l’enfant ne reçoit de nourriture que celle qu’atteint sa fronde au but que lui montre sa mère. Cependant ce déluge de pierres n’épouvanta pas longtemps les Romains. Quand on en vint à combattre de près et que les insulaires eurent fait l’expérience de nos éperons et de nos javelots, ils poussèrent, comme des troupeaux, un grand cri, et s’enfuirent vers leurs rivages. S’étant dispersés dans les montagnes

  1. Aujourd’hui la Cauée.