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LXV. C’est une coutume parmi les habitants de l’Afrique d’avoir dans presque toutes les campagnes et tous les villages des souterrains où ils serrent leur blé ; cela, principalement, en vue de la guerre et des incursions de l’ennemi. César en fut informé : il fit partir à la troisième veille deux légions avec sa cavalerie, et les envoya à dix mille pas de son camp, d’où elles revinrent chargées de blé. Labiénus, en ayant eu avis, s’avança l’espace de sept mille pas par les mêmes hauteurs par où César avait passé le jour précédent, et y fit camper deux légions. Persuadé que César enverrait souvent chercher du blé par la même route, il se tint lui-même chaque jour en embuscade dans les lieux propices avec une nombreuse cavalerie et des troupes légères.

LXVI. Cependant César, averti par des transfuges du piège que lui tendait Labiénus, laissa passer quelques jours, attendant que l’ennemi se lassât de faire continuellement le même exercice, et devint plus négligent ; et, tout à coup, un matin, il ordonne à huit légions de vétérans et à une partie de la cavalerie de sortir par la porte décumane et de le suivre. La cavalerie, ayant pris les devants, tomba sur les postes cachés en embuscade dans les vallons, tua environ cinq cents hommes d’infanterie légère, et fit fuir le reste honteusement. Alors Labiénus vint à leur secours avec toute sa cavalerie. Comme les cavaliers de César étaient trop peu nombreux pour résister à cette multitude, ils commencèrent à plier, lorsqu’il parut lui-même avec ses légions rangées en bataille. À cette vue, Labiénus, étonné, s’arrêta, et César fit retirer ses cavaliers sans avoir eu aucune perte. Le lendemain Juba fit mettre en croix tous les Numides qui avaient abandonné leur poste pour se réfugier dans le camp.

LXVII. Cependant César, voyant qu’il n’avait plus de blé, rassemble toutes ses troupes dans le camp, met garnison dans Leptis, dans Ruspina, dans Acylla, laisse la flotte sous le commandement de Cispius et d’Aquila, avec ordre de croiser, l’un devant Hadrumète, l’autre devant Thapsus ; puis, ayant mis le feu à son camp, il en part à la quatrième veille en bataille, ses bagages à l’aile gauche, et arrive devant Aggar, ville souvent assiégée par les Gétules, et toujours vaillamment défendue par ses habitants. Là, après avoir formé un seul camp dans la plaine, il part lui-même avec une partie de son armée pour aller chercher des vivres aux environs, et revient au camp avec beaucoup d’orge, d’huile, de vin, de figues, peu de blé, mais son armée rafraîchie. Scipion, de son côté, apprenant que César était parti, le suivit par les hauteurs avec toutes ses troupes, et prit position à une distance de six mille pas, où il forma trois camps séparés.

LXVIII. Il y avait une ville nommé Zéta[1], située à cinq mille pas de Scipion, du côté de son camp, mais plus éloignée du camp de César, car elle en était séparée par un espace de treize mille pas. Scipion y envoya deux légions pour avoir du blé. César, averti par un transfuge, transporte

  1. Aujourd’hui Zerbi.