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n’avait pas encore été informé), ils résolurent d’intercepter les convois qui nous venaient par mer. (2) À cet effet, ayant fait partir des vaisseaux et mis plusieurs navires en embuscade vers Canope, ils se préparaient à surprendre nos convois. (3) Dès que César en est instruit, il fait armer et partir sa flotte sous la conduite de Tibérius Néro. Elle est accompagnée des vaisseaux rhodiens, commandés par Euphranor, sans lequel il ne s’était donné aucun combat naval, et avec qui nous avions toujours été heureux. (4) Alors la Fortune, qui d’ordinaire réserve les plus grandes disgrâces à ceux qu’elle a le plus favorisés, avait changé tout à coup et était devenue contraire à Euphranor. (5) En effet, lorsque nous fûmes arrivés à Canope et que les deux flottes eurent engagé le combat, Euphranor, qui, selon sa coutume, était entré le premier dans l’action, et qui avait percé et coulé à fond une trirème, en poursuivit trop loin une autre qui était près de celle-là ; mais le reste de la flotte n’ayant pas été assez prompt à le suivre, il fut enveloppé par les Alexandrins. (6) Personne ne lui porta secours, soit que l’on eût trop de confiance en son courage et en son bonheur, soit que chacun craignît pour soi. Ainsi il se distingua seul dans ce combat, et seul y périt avec sa galère victorieuse.

Marche de Mithridate vers Alexandrie

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(1) Vers ce même temps, Mithridate de Pergame, homme d’une haute naissance, distingué par ses talents militaires et sa bravoure, et cher à César pour sa constante fidélité, envoyé, dès le commencement de la guerre d’Alexandrie, en Syrie et en Cilicie, afin d’y aller chercher des secours, revint par terre avec des troupes nombreuses, que sa diligence et l’affection des habitants de ce pays lui avaient fait rassembler en peu de temps. (2) Il les amena à Péluse, qui joint l’Égypte à la Syrie. Achillas avait mis une forte garnison dans cette place, dont il connaissait les avantages ; car on ne peut entrer en Égypte du côté de la mer que par le Phare, et du côté de la terre que par Péluse ; en sorte que ces deux postes sont comme les clefs du royaume. Mithridate l’investit tout à coup avec des forces considérables ; et, malgré la résistance opiniâtre des habitants, grâce au grand nombre de ses troupes, qui lui permettait d’en envoyer de fraîches relever celles qui étaient fatiguées ou blessées, et aussi à force de persévérance et de fermeté, il emporta cette place le même jour qu’il l’avait attaquée, et y mit garnison. (3) Après ce succès, il marcha sur Alexandrie pour joindre César, et, par cette autorité qui d’ordinaire accompagne le vainqueur, il soumit toute la contrée qu’il traversa et l’obligea à se déclarer pour César.

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(1) À peu de distance d’Alexandrie, est une des contrées les plus célèbres de l’Égypte, qu’on appelle le Delta, à cause de sa ressemblance avec la lettre grecque de ce nom. De ce côté en effet, le Nil, quittant sa rive d’une façon merveilleuse pour se partager peu à peu en deux branches qui vont toujours s’élargissant, tombe dans la mer en deux endroits fort éloignés l’un de l’autre. (2) Le roi, informé de l’approche de Mithridate et sachant qu’il devait passer ce fleuve, envoya contre lui de nombreuses troupes qu’il croyait suffisantes