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généraux doivent exciter et non comprimer cet élan ; et ce n’est pas pour rien que de temps immémorial il a été établi qu’avant le combat toutes les trompettes sonneraient et que de grands cris seraient poussés par les troupes : par là une armée épouvante l’ennemi et s’anime elle-même.

La bataille. Déroute des Pompéiens

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(1) Cependant nos soldats, au signal donné, s’élancent, le javelot à la main ; mais, ayant remarqué que ceux de Pompée ne couraient point à eux, instruits par l’expérience, et formés par les combats précédents, ils ralentirent d’eux-mêmes le pas et s’arrêtèrent au milieu de leur course, pour ne pas arriver hors d’haleine ; et, quelques moments après, ayant repris leur course, ils lancèrent leurs javelots, et puis, selon l’ordre de César, saisirent leurs épées. (2) Les soldats de Pompée firent bonne contenance ; ils reçurent la décharge des traits, soutinrent, sans se rompre, le choc des légions, et, après avoir lancé leurs javelots, mirent aussi l’épée à la main. (3) En même temps la cavalerie de Pompée, qui était à l’aile gauche, s’élança comme elle en avait l’ordre, et la foule des archers se répandit de toutes parts. (4) Notre cavalerie ne soutint pas le choc et plia quelque peu : celle de Pompée ne la pressa que plus vivement, et commença à développer ses escadrons et nous envelopper par le flanc. (5) À cette vue, César donna le signal à la quatrième ligne, composée de six cohortes. (6) Elles s’ébranlèrent aussitôt, et chargèrent avec tant de vigueur la cavalerie de Pompée, que pas un ne tint ferme, et que tous, ayant tourné bride, non seulement quittèrent la place, mais s’enfuirent à la hâte vers les plus hautes montagnes. (7) Eux partis, les frondeurs et les archers se trouvèrent sans défense et sans appui, et tous furent taillés en pièces. (8) Du même pas, les cohortes se portèrent sur l’aile gauche, dont le centre soutenait encore nos efforts, l’enveloppèrent et la prirent à revers.

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(1) En même temps César fit avancer la troisième ligne qui, jusque-là, s’était tenue tranquille à son poste. (2) Ces troupes fraîches ayant relevé celles qui étaient fatiguées, les soldats de Pompée, d’ailleurs pressés à dos, ne purent résister, et tous prirent la fuite. (3) César ne s’était pas trompé, lorsqu’il avait prédit à ses troupes, en les haranguant, que ces cohortes, qu’il avait placées en quatrième ligne pour les opposer à la cavalerie ennemie, commenceraient la victoire. (4) Ce fut en effet par elles que la cavalerie fut d’abord repoussée ; par elles que les archers et les frondeurs furent taillés en pièces ; par elles que l’aile gauche de l’ennemi fut enveloppée, ce qui décida la déroute. (5) Dès que Pompée vit sa cavalerie repoussée, et cette partie de l’armée sur laquelle il comptait le plus saisie de terreur, se fiant peu au reste, il quitta la bataille, et courut à cheval vers son camp, où, s’adressant aux centurions qui gardaient la porte prétorienne, il leur dit à haute voix pour être entendu des soldats : "Gardez bien le camp, et défendez-le avec zèle en cas de malheur ; pour moi, je vais en faire le tour et assurer les