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environ vingt-deux mille hommes. Deux cohortes avaient été laissées à la garde du camp. (3) César avait donné le commandement de l’aile gauche à Antoine, celui de la droite à P. Sylla, celui du centre à Cn. Domitius. Pour lui il se plaça en face de Pompée. (4) Mais, après avoir reconnu la disposition de l’armée ennemie, craignant que son aile droite ne fût enveloppée par la nombreuse cavalerie de Pompée, il tira au plus tôt de sa troisième ligne une cohorte par légion, et en forma une quatrième ligne pour l’opposer à la cavalerie ; il lui montra ce qu’elle avait à faire et l’avertit que le succès de la journée dépendait de sa valeur. (5) En même temps il commanda à toute l’armée, et en particulier à la troisième ligne, de ne pas s’ébranler sans son ordre, se réservant, quand il le jugerait à propos, de donner le signal au moyen de l’étendard.

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(1) Ensuite, haranguant les soldats suivant la coutume militaire, et leur ayant rappelé les bienfaits dont il les avait comblés en tous temps, il les prit à témoin de l’ardeur avec laquelle il avait constamment recherché la paix, des conférences de Vatinius, de celles de Clodius avec Scipion, des négociations entamées à Oricum avec Libon pour l’envoi des députés. (2) Il ajouta qu’il n’avait jamais voulu prodiguer le sang des troupes, ni priver la république d’une de ses armées. (3) Ce discours fini, comme les soldats, pleins d’ardeur, demandaient le combat, il fit sonner la charge.

Belle attitude d’un centurion

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(1) Il y avait dans l’armée de César un vétéran nommé Crastinus, qui, l’année précédente, avait été principal de la dixième légion, homme d’une rare valeur. (2) Aussitôt que le signal est donné : "Suivez-moi, dit-il, vous qui fûtes autrefois mes compagnons, et servez votre général avec le zèle que vous lui avez promis. Voici notre dernier combat ; après il aura recouvré son honneur, et nous la liberté." (3) En même temps, se tournant vers César : "Général, lui dit-il, je me conduirai aujourd’hui de telle sorte que, vivant ou mort, je sois loué par toi." (4) À ces mots, il s’élança le premier de l’aile droite, et environ cent vingt volontaires de la même centurie le suivirent.

Tactique de Pompée

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(1) Il ne restait entre les deux armées qu’autant d’espace qu’il en fallait pour le choc ; (2) mais Pompée avait recommandé aux siens d’essuyer notre premier effort sans s’ébranler, et de laisser ainsi notre ligne s’ouvrir : c’était, dit-on, C. Triarius qui avait donné ce conseil, afin d’amortir notre élan et d’épuiser nos forces, de mettre nos rangs en désordre, puis de tomber sur nous, serrés, lorsque nous serions entr’ouverts : (3) il se flattait que nos javelots feraient beaucoup moins d’effet, ses troupes demeurant à leur poste, que si elles-mêmes marchaient au-devant de nos coups ; et que nos soldats, ayant doublé la course, perdraient haleine et tomberaient épuisés. (4) En cela, ce nous semble, Pompée agit sans raison ; car l’émulation et la vivacité naturelle à l’homme s’enflamment encore par l’ardeur du combat.(5) Les