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succès précédents et l’espérance de la victoire. (3) Entraîné par ces divers motifs, il envoie, dès l’entrée de la nuit, toute sa cavalerie vers la rivière de Bagrada, au camp ennemi que commandait Saburra, dont nous avons parlé. Mais le roi suivait son lieutenant avec toutes ses troupes, et n’était éloigné de lui que de six mille pas. (4) Les cavaliers de Curion, ayant marché toute la nuit, arrivent à l’ennemi et l’attaquent au dépourvu ; car les Numides, selon la coutume des Barbares, campent dispersés et sans ordre. (5) Surpris en cet état, et au milieu du sommeil, un grand nombre est tué ; un plus grand nombre, effrayé, prend la fuite. Nos cavaliers reviennent vers Curion, emmenant avec eux leurs prisonniers.

(1) Curion, avec toutes ses troupes, était parti dès la quatrième veille, laissant cinq cohortes à la garde du camp. À la distance de six mille pas, il rencontre sa cavalerie, qui lui apprend ce qui vient de se passer ; il demande aux prisonniers qui commande au camp de Sagrada. Ils répondent Saburra. (2) Là-dessus, négligeant les autres informations, pressé qu’il est d’achever sa route, et se tournant vers les plus proches enseignes : "Soldats, dit-il, voyez-vous comme le rapport des prisonniers s’accorde avec celui des transfuges ? Le roi n’est pas avec son armée, et il faut qu’il ait envoyé bien peu de troupes, puisqu’elles n’ont pu tenir contre quelques cavaliers. (3) Hâtez-vous donc ; courez au butin, à la gloire ; et nous ne penserons plus qu’à récompenser vos services et à vous témoigner notre reconnaissance." (4) Ce qu’avaient fait nos cavaliers était beau sans doute, surtout à comparer leur petit nombre à la multitude des Numides ; mais, avec le penchant qu’ont tous les hommes à se louer, ils exagéraient encore cet avantage. (5) Ils étalaient en outre de nombreuses dépouilles, montraient les hommes, les chevaux qu’ils avaient pris ; en sorte que chaque instant de délai semblait retarder d’autant la victoire. (6) Ainsi l’ardeur des troupes secondait les espérances de Curion. Il ordonne à sa cavalerie de le suivre, et hâte sa marche pour surprendre l’ennemi encore effrayé et fuyant. Les cavaliers, harassés d’avoir marché toute la nuit, ne pouvaient suivre, et beaucoup, restaient en chemin. Rien de tout cela ne diminuait la confiance de Curion.

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(1) Juba, instruit par Saburra de ce combat de nuit, lui envoie deux mille cavaliers espagnols et gaulois qu’il avait coutume de tenir près de sa personne, et la partie de son infanterie sur laquelle il comptait le plus ; lui-même il suit plus lentement avec le reste de ses troupes et soixante éléphants, (2) se doutant bien que Curion, après avoir envoyé devant sa cavalerie, allait lui-même se montrer. Saburra range toute son armée en bataille, cavaliers et fantassins, en leur commandant de céder et de reculer peu à peu comme s’ils avaient peur ; il leur donnera le signal du combat quand il en sera temps, et les ordres nécessaires, selon les circonstances. (3) À cette vue, Curion sent croître son espoir ; s’imaginant que l’ennemi prend la fuite, il quitte les hauteurs et descend dans la plaine.

Défaite et mort de Curion

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(1) Il s’avance encore à quelque distance ; et comme, après une marche de seize milles, ses troupes étaient épuisées