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Il fit des levées dans toute la province ; après avoir formé deux légions, il y ajouta environ trente cohortes auxiliaires ; il ramassa une grande quantité de blé pour l’envoyer aux Marseillais ainsi qu’à Afranius et à Pompée, ordonna aux habitants de Gadès de lui fournir dix galères, en commanda plusieurs à Hispalis ; (2) il transporta à Gadès tout l’argent et tous les ornements qui se trouvaient dans le temple d’Hercule, y mit en garnison six cohortes tirées de la province, et en donna le commandement à C. Gallonius, chevalier romain, ami de Domitius qui l’avait envoyé dans ce pays pour y recueillir une succession ; il fit déposer chez ce Gallonius toutes les armes des particuliers ou de l’état, (3) et prononça des discours malveillants contre César. Il disait souvent du haut de son tribunal que "César avait été battu, qu’un grand nombre de ses soldats avait déserté vers Afranius ; qu’il savait cela de manière certaine, par des messagers dignes de foi." (4) Ayant, par ces discours, effrayé les citoyens romains de cette province, il les força de lui donner, sous prétexte du service de la république, quatorze cent mille livres d’argent et cent vingt mille boisseaux de blé. (5) Soupçonnait-il quelque ville d’être attachée à César, il la surchargeait, y mettait garnison ; il rendait des jugements contre les particuliers qui avaient mal parlé de la république, et confisquait leurs biens ; enfin il obligeait toute la province à prêter serment à Pompée et à lui-même. (6) Ayant appris ce qui s’était passé dans l’Espagne citérieure, il se prépara à la guerre. Son plan était de s’enfermer dans Gadès avec ses deux légions, ses vaisseaux et tous ses vivres, parce qu’il avait reconnu que la province entière était dans les intérêts de César. Il comptait que dans cette île il lui serait aisé, avec ses vaisseaux et ses provisions, de traîner la guerre en longueur. (7) César, bien que plusieurs affaires importantes le rappelassent en Italie, avait pourtant résolu de ne laisser en Espagne aucun reste de guerre ; car il savait que Pompée s’était fait, par ses bienfaits et ses grâces, de nombreux partisans dans la province citérieure.

Sympathie de la province pour César

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(1) En conséquence, après avoir envoyé deux légions dans l’Espagne ultérieure, sous les ordres de Q. Cassius, tribun du peuple, il y marche lui-même à grandes journées avec six cents chevaux, et se fait précéder d’un édit par lequel il marque aux magistrats et aux principaux de toutes les villes le jour où il veut qu’ils viennent le joindre à Cordoue. (2) Cet édit ayant été publié dans toute la province, il n’y eut point de ville qui n’envoyât, au jour désigné, une partie de son sénat à Cordoue ; il n’y eut pas même de citoyen romain un peu considérable qui ne s’y rendît. (3) En même temps l’assemblée de Cordoue ferma de son propre mouvement les portes à Varron, et mit des gardes sur les murailles et dans les tours. Deux cohortes, de celles que l’on appelait coloniques, passaient par hasard de ce côté ; elle les retint pour la défense de la ville. (4) À la même époque, les habitants de Carmona, l’une des plus fortes villes de toute la province, chassèrent trois cohortes