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Afranius, dont l’arrière-garde était pressée par notre cavalerie, et qui nous voyait devant lui, gagna une colline et s’y arrêta. (4) De cette position, il détacha quatre cohortes espagnoles vers une haute montagne qui était en vue des deux armées. Il leur ordonna d’aller l’occuper en courant, dans le dessein de s’y porter lui-même avec toutes ses troupes, et, changeant de route, de gagner Octogésa par les hauteurs. (5) Mais, tandis que ces cohortes se dirigeaient vers ce poste par une marche oblique, la cavalerie de César, les ayant aperçues, tomba sur elles : ces cohortes ne purent soutenir le choc un seul instant, et elles furent enveloppées et taillées en pièces à la vue des deux armées.

(1) L’occasion était favorable ; et César lui-même pensait bien qu’après un tel échec, reçu sous ses yeux, l’armée ennemie ne pourrait soutenir l’attaque, surtout étant enveloppée par sa cavalerie et forcée de combattre dans un pays plat et découvert. De toutes parts on demandait le signal ; (2) les lieutenants, les centurions, les tribuns militaires, accouraient vers lui, et l’engageaient à ne pas hésiter à livrer bataille : les soldats étaient dans les meilleures dispositions : (3) ceux d’Afranius, au contraire, avaient donné plusieurs marques de crainte, n’ayant osé ni secourir les leurs, ni descendre de la colline, ni soutenir le choc de notre cavalerie, et ayant réuni leurs enseignes dans le même endroit, sans s’inquiéter de les défendre ni de garder leurs rangs. (4) Si ce qui l’arrêtait c’était le désavantage du terrain, il ne faudrait pas moins tôt ou tard combattre ; car Afranius, ne pouvant rester sans eau, quitterait nécessairement ce poste.

Temporisation de César

72

(1) César se flattait de pouvoir terminer l’affaire sans combat et sans exposer ses troupes, en coupant les vivres à l’ennemi. (2) Pourquoi acheter même une victoire au prix du sang de quelques-uns des siens ? Pourquoi exposer aux blessures des soldats qui avaient si bien mérité de lui ? Pourquoi enfin tenter la fortune, alors que le devoir d’un général est de vaincre par la prudence aussi bien que par l’épée ? (3) D’ailleurs, il était ému de pitié pour tant de citoyens dont il voyait la perte inévitable, et il aimait mieux une victoire qui lui permit de les sauver. (4) Cette résolution de César était blâmée par le plus grand nombre : les soldats disaient entre eux à haute voix que, puisqu’il laissait échapper une telle occasion de vaincre, ils ne se battraient pas quand César le voudrait. Il demeure inébranlable, et s’éloigne un peu afin de rassurer l’ennemi. (5) Pétréius et Afranius, voyant qu’ils en ont la facilité, rentrent aussitôt dans leur camp. César place des postes sur les hauteurs, ferme tous les chemins qui conduisent à l’Èbre, et vient camper le plus près qu’il peut des ennemis.

Inquiétude des chefs pompéiens

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(1) Le lendemain, leurs généraux, inquiets d’être séparés de l’Èbre et de manquer de vivres, délibéraient sur ce qu’ils avaient à faire. (2) Il leur restait un chemin pour retourner à Ilerda, un autre pour aller à Tarraco. Pendant qu’ils se consultent, on annonce que ceux de leurs