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on annonce à Afranius qu’un grand convoi, destiné à César, est arrêté près du fleuve. II lui venait des archers du pays des Rutènes, et des cavaliers Gaulois, traînant à leur suite, selon la coutume de ce peuple, quantité de chariots et de bagages. (2) Il y avait en outre environ six mille hommes de toute condition avec leurs esclaves et leurs affranchis, mais sans ordre, sans chef, chacun d’eux se gouvernant à sa fantaisie, et suivant son chemin sans précaution, comme ils avaient fait au début de leur marche. (3) Dans le nombre se trouvaient des jeunes gens de noble famille, des fils de sénateurs et de chevaliers romains, des députés des villes, des lieutenants de César. Toute cette troupe était arrêtée sur la rive du fleuve. (4) Afranius part de nuit avec toute sa cavalerie et trois légions pour les aller accabler ; la cavalerie prend les devants et les attaque au dépourvu. Cependant la cavalerie gauloise se met promptement en défense et engage le combat. (5) Tant qu’elle n’eut affaire qu’à des troupes de même arme, elle résista malgré la supériorité du nombre ; mais lorsqu’elle vit approcher les enseignes des légions, elle se retira, avec peu de perte, sur les montagnes voisines. (6) Ce combat sauva les autres : ils purent, pendant ce temps, s’échapper et gagner les hauteurs. On perdit ce jour-là environ deux cents archers, plusieurs cavaliers, des valets et quelque bagage.

(1) Cependant toutes ces circonstances augmentèrent la cherté des vivres, suite ordinaire de la disette du moment et de la crainte de l’avenir. (2) Déjà le boisseau de blé se vendait cinquante deniers ; le soldat, mal nourri, perdait ses forces ; et le mal allait sans cesse croissant. (3) En peu de jours la face des affaires changea tellement, et notre fortune avait tellement fléchi que nos soldats manquaient des choses les plus nécessaires, tandis que ceux d’Afranius regorgeaient de tout et semblaient nous être supérieurs. (4) César, ne pouvant avoir du blé, demandait du bétail aux peuples qui s’étaient déclarés ses alliés, renvoyait les valets de l’armée dans les pays plus éloignés, et pourvoyait lui-même, autant qu’il lui était possible, aux nécessités du moment.

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(1) Les embarras de notre situation étaient encore exagérés par Afranius, Pétréius et leurs amis, dans les lettres qu’ils écrivaient à Rome. Le bruit public y ajoutait encore ; de sorte que la guerre semblait presque finie. (2) Quand ces lettres et ces nouvelles arrivèrent à Rome, on courut en foule chez Afranius pour féliciter sa famille, et beaucoup de citoyens partirent d’Italie pour aller joindre Pompée : les uns voulaient être les premiers à lui porter ces nouvelles ; les autres, craignant de paraître avoir attendu l’événement, ou de venir les derniers de tous.

César réussit à reconstruire un pont

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(1) Dans cette extrémité, tous les passages étant fermés par l’infanterie et la cavalerie d’Afranius, et comme on ne pouvait achever les ponts, César ordonne aux soldats de construire. des bateaux pareils à ceux dont il avait autrefois appris à se servir, en Bretagne : (2) la quille et les bancs étaient