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quelque effroi ou quelque dommage à notre province.

XXXI. C. Fabius marcha avec le reste de l’armée contre les Carnutes et les autres nations dont il savait que Dumnacos avait obtenu des secours dans le dernier combat. Il ne doutait point que leur défaite récente ne les rendît plus soumis ; mais que, s’il leur laissait le temps de se remettre de leur effroi, les instances de Dumnacos ne pussent encore les soulever. Dans cette conjoncture, Fabius parvint avec autant de bonheur que de célérité à tout faire rentrer dans le devoir. Les Carnutes qui, souvent battus, n’avaient jamais parlé de paix, donnèrent des otages et se soumirent. Entraînés par leur exemple, les autres peuples, qui habitent à l’extrême limite de la Gaule, près de l’Océan, et qu’on appelle Armoricains, nous obéirent sans délai, à l’arrivée de Fabius et des légions. Dumnacos, chassé de son territoire, errant, réduit à se cacher, fut obligé de gagner seul les régions de la Gaule les plus reculées.

XXXII. Drappès et Luctérios, apprenant l’arrivée des légions et de Caninius, sentirent que, poursuivis par l’armée, ils ne pourraient pénétrer sur le territoire de la province sans une perte certaine, ni continuer en liberté leurs courses et leurs brigandages. Ils s’arrêtèrent sur les terres des Cadurques. Luctérios, qui avant ses revers avait eu beaucoup d’influence sur ses concitoyens, et à qui son audace, toujours prête à de nouvelles entreprises, donnait un grand crédit parmi les Barbares, vint, avec ses troupes, unies à celles de Drappès, occuper la place d’Uxellodunum[1], anciennement dans sa clientèle, et très forte par sa position. Il en gagna les habitants.

XXXIII. C. Caninius, s’y étant aussitôt porté, constata que la place était de tous côtés défendue par des rochers escarpés, qui en eussent rendu, même sans garnison, l’accès difficile à des hommes armés : mais sachant que les bagages des habitants étaient nombreux, et qu’on ne pouvait essayer de les faire sortir en secret, sans qu’ils fussent atteints par la cavalerie et même par les légions, il divisa les cohortes en trois parties, établit trois camps dans des positions très élevées, et de là il commença peu à peu, autant que le permettait le nombre des troupes, à tirer une ligne de circonvallation autour de la place.

XXXIV. À cette vue, les habitants, se rappelant tous les malheurs d’Alésia, redoutant un sort semblable, et avertis par Luctérios, qui avait assisté à ce désastre, de pourvoir surtout aux subsistances, arrêtent, d’un consentement unanime, qu’après avoir laissé dans la place une partie des troupes, les autres iront chercher des vivres. Cette résolution prise, Drappès et Luctérios laissent dans la ville deux mille hommes de garnison, et sortent la nuit suivante avec le reste. En peu de jours ils eurent ramassé une grande quantité de blé sur les terres des Cadurques, dont les uns le livrèrent de

  1. Aujourd’hui le Puy ou Puech d’Issolu, dans le Quercy (département du Lot).