Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/333

Cette page n’a pas encore été corrigée

ples en armes ; il ne croyait pas que le lieutenant C. Caninius Rébilus (10), qui commandait dans ces contrées, fût assez fort avec les deux légions qu’il avait sous ses ordres. Il fit venir près de lui T. Labiénus, et envoya la douzième légion, qui avait hiverné avec ce lieutenant, protéger les colonies romaines dans la Gaule citérieure, et les préserver de calamités semblables à celles qu’avaient essuyées, l’été précédent, les Tergestins, dont le territoire avait été ravagé par suite d’une irruption soudaine de Barbares. Pour lui, il alla dévaster les terres d’Ambiorix. Désespérant de réduire en son pouvoir cet ennemi fugitif et tremblant, il crut, dans l’intérêt de son honneur, devoir détruire si bien, dans les états de ce prince, les citoyens, les édifices, les bestiaux, que désormais en horreur à ceux qui échapperaient par hasard au massacre, Ambiorix ne pût jamais rentrer dans un pays sur lequel il aurait attiré tant de désastres.

XXV. Lorsque César eut distribué ses légions et ses auxiliaires sur toutes les parties du territoire d’Ambiorix, que tout y eut été détruit par le meurtre, l’incendie, le pillage, et qu’un grand nombre d’hommes eurent été pris ou tués, il envoya Labiénus avec deux légions chez les Trévires, peuple qui, sans cesse en guerre à cause du voisinage de la Germanie, ne différait pas beaucoup des Germains pour les mœurs et la férocité, et n’obéissait jamais aux ordres de César que par la force des armes.

XXVI. Cependant le lieutenant C. Caninius, informé par Durat (11) qui était toujours resté attaché aux Romains, malgré la défection d’une partie de sa nation, qu’un grand nombre d’ennemis s’étaient rassemblés sur les frontières des Pictons, se dirigea vers la place de Lémonum[1]. Comme il en approchait, des prisonniers l’instruisirent que Duratios s’y trouvait assiégé par plusieurs milliers d’hommes sous la conduite de Dumnacos, chef des Andes. N’osant combattre avec si peu de légions, il campa dans une forte position. Dumnacos, à la nouvelle de l’approche de Caninius, tourna toutes ses forces contre les légions ; et vint attaquer le camp des Romains. Mais ayant perdu plusieurs jours et beaucoup de monde à cette attaque, sans avoir pu faire la moindre brèche à nos retranchements, il revint assiéger Lémonum.

XXVII. Dans le même temps, le lieutenant C. Fabius, occupé à recevoir les soumissions et les otages de diverses nations, apprit, par les lettres de Caninius, ce qui se passait chez les Pictons. À cette nouvelle, il partit au secours de Duratios. Mais Dumnacos fut à peine instruit de son arrivée, que, désespérant de se sauver, s’il lui fallait à la fois résister à l’ennemi du dehors et avoir l’œil sur les assiégés qui le tenaient en crainte, il se hâta de se retirer avec ses troupes, et ne se crut point en sûreté qu’il ne les eût conduites au-delà de la Loire, qu’il fallait passer sur un pont, à cause de la largeur du fleuve. Quoique Fabius n’eût pas encore paru devant l’ennemi, ni joint Caninius, cependant, sur le rapport de ceux qui connaissaient la nature du pays, il conjectura

  1. Aujourd’hui Poitiers.