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fourrages et des vivres, on pouvait, à l’abri de ces retranchements, défendre le camp avec peu de troupes. Cependant il se livrait souvent de petits combats entre les deux camps, séparés par un marais. Quelquefois c’étaient nos auxiliaires gaulois et germains qui passaient ce marais et poursuivaient vivement les ennemis ; quelquefois, à leur tour, c’étaient ceux-ci qui, franchissant le marais, nous repoussaient au loin. Il arrivait aussi, vu l’obligation où l’on était tous les jours de se diviser pour aller chercher des vivres dans des habitations éparses, que nos fourrageurs dispersés étaient enveloppés dans des lieux désavantageux ; ce qui, bien que le dommage se réduisît à la perte d’un petit nombre de valets et de chevaux, ne laissait pas d’augmenter la folle présomption des Barbares. Ajoutez que Commios, lequel j’ai dit être parti en Germanie pour y chercher des secours, en était revenu avec des cavaliers. Leur nombre n’excédait pas cinq cents ; toutefois, leur arrivée avait rendu les Barbares plus arrogants.

XI. César, voyant que l’ennemi, défendu par un marais et par sa position, se tenait depuis plusieurs jours dans son camp, et jugeant qu’il ne pouvait l’attaquer sans de grandes pertes, ni l’enfermer dans des lignes sans un renfort de troupes, écrivit à Trébonius d’appeler le plus promptement possible la treizième légion qui hivernait chez les Bituriges avec le lieutenant T. Sextius, et de venir le joindre à grandes journées avec trois légions. Il employa tour à tour les cavaliers des Rèmes, des Lingons et des autres états qui lui en avaient fourni un grand nombre, à protéger les fourrages et à soutenir les attaques soudaines des ennemis.

XII. Comme cette manœuvre avait lieu chaque jour et que déjà, par l’habitude même, on était devenu moins diligent (effet ordinaire de la durée), les Bellovaques, connaissant les postes habituels de nos cavaliers, choisirent un corps d’infanterie et le mirent en embuscade dans un bois : le lendemain ils envoyèrent de la cavalerie pour y attirer la nôtre, l’envelopper et l’attaquer. Ce malheureux sort tomba sur les Rèmes qui, ce jour-là, se trouvaient en tour de service. Ils eurent à peine aperçu la cavalerie ennemie à laquelle ils se croyaient supérieurs, que, méprisant son petit nombre, ils la poursuivirent avec ardeur ; ils furent alors entourés de tous côtés par les fantassins. Étonnés de cette attaque, ils se retirèrent plus vite qu’il n’est d’usage dans un combat de cavalerie. Ils avaient perdu dans l’action le chef de leur nation, Vertiscos, commandant de la cavalerie. Il pouvait à peine, à cause de son grand âge, se soutenir à cheval ; mais fidèle aux coutumes gauloises, il n’avait ni fait valoir cette excuse de l’âge pour se dispenser du commandement, ni voulu que l’on combattit sans lui. La fierté des ennemis s’accrut par l’avantage qu’ils venaient de remporter et par la mort du chef et du commandant des Rèmes ; mais cet échec avertit les nôtres de mettre plus de soin à explorer les lieux avant d’y placer des postes, et plus de modération dans la poursuite de l’ennemi lorsqu’il céderait le terrain.