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courroie de son javelot et de la lancer dans les retranchements du camp. César écrivait que, parti avec les légions, il allait bientôt arriver, et exhortait Cicéron à conserver tout son courage (14). Dans la crainte du péril, et selon ses instructions, le Gaulois lance son javelot ; il se fiche par hasard dans une tour, y reste deux jours sans être aperçu, et n’est découvert que le troisième par un soldat, qui prend la lettre et la porte à Cicéron. La lecture qui en est faite en présence des soldats excite parmi eux d’unanimes transports de joie. Déjà on voyait la fumée des incendies (15), et il ne put rester aucun doute sur l’approche des légions.

XLIX. Les Gaulois, avertis par leurs coureurs, lèvent le siège et marchent contre César avec toutes leurs troupes ; elles se composaient d’environ soixante mille hommes (16). Cicéron, ainsi dégagé, demande à son tour à ce même Vertico, dont nous avons parlé plus haut, un Gaulois, pour porter une lettre à César, et recommande au porteur la prudence et la célérité. Il annonçait par cette lettre que les ennemis l’avaient quitté, et tournaient toutes leurs forces contre César. Celui-ci, l’ayant reçue vers le milieu de la nuit, en fait part aux siens et les anime pour le combat. Le lendemain, au point du jour, il lève son camp, et il a fait à peine quatre mille pas, qu’il aperçoit une multitude d’ennemis au-delà d’une grande vallée traversée par un ruisseau. Il eût été très dangereux de combattre des troupes si nombreuses dans un lieu défavorable. D’ailleurs il voyait Cicéron délivré des Barbares qui l’assiégeaient, il pouvait ralentir sa marche, et il s’arrêta dans le poste le plus avantageux possible, pour s’y retrancher dans son camp. Quoique ce camp eût peu d’étendue par lui-même, puisqu’il contenait à peine sept mille hommes sans aucuns bagages, il le resserre encore dans le moindre espace possible, afin d’inspirer aux ennemis le plus grand mépris. En même temps, il envoie partout ses éclaireurs reconnaître l’endroit le plus commode pour traverser le vallon.

L. Dans cette journée, qui se passa en escarmouches de cavalerie près du ruisseau, chacun resta dans ses positions : <les Gaulois, parce qu’ils attendaient l’arrivée de troupes plus nombreuses ; César, parce qu’en feignant de craindre, il espérait attirer l’ennemi près de ses retranchements et le combattre en deçà du vallon, à la tête de son camp ; dans le cas contraire, il voulait reconnaître assez les chemins pour traverser avec moins de péril le vallon et le ruisseau. Dès le point du jour, la cavalerie ennemie s’approcha du camp et engagea le combat avec la nôtre. Aussitôt César ordonne à ses cavaliers de céder et de rester dans le camp ; il ordonne en même temps de donner partout plus de hauteur aux retranchements, de boucher les portes, et, en exécutant ces travaux, de courir çà et là dans la plus grande confusion, avec tous les signes de l’effroi.

LI. Attirées par cette feinte, les troupes ennemies passent le ravin, et se rangent en bataille dans un lieu désavantageux. Voyant même que les nôtres laissaient le rempart dégarni, les Barbares s’en approchent de plus près, y lancent