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mais par troupes séparées et à de grands intervalles, et disposaient des corps de réserve, destinés à les recueillir, et à remplacer par des troupes fraîches celles qui étaient fatiguées.

XVII. Le jour suivant, les ennemis prirent position loin du camp, sur des collines ; ils ne se montrèrent qu’en petit nombre et escarmouchèrent contre notre cavalerie plus mollement que la veille. Mais, vers le milieu du jour, César ayant envoyé au fourrage trois légions et toute la cavalerie sous les ordres du lieutenant Trébonius, ils fondirent subitement et de toutes parts sur les fourrageurs, peu éloignés de leurs drapeaux et de leurs légions. Les nôtres, tombant vigoureusement sur eux, les repoussèrent ; la cavalerie, comptant sur l’appui des légions qu’elle voyait près d’elle, ne mit point de relâche dans sa poursuite, et en fit un grand carnage, sans leur laisser le temps ni de se rallier, ni de s’arrêter, ni de descendre des chars. Après cette déroute, les secours qui leur étaient venus de tous côtés, se retirèrent ; et depuis ils n’essayèrent plus de nous opposer de grandes forces.

XVIII. César, ayant pénétré leur dessein, se dirigea vers la Tamise sur le territoire de Cassivellaunos. Ce fleuve n’est guéable que dans un seul endroit, encore le passage est-il difficile. Arrivé là, il vit l’ennemi en forces, rangé sur l’autre rive. Cette rive était défendue par une palissade de pieux aigus ; d’autres pieux du même genre étaient enfoncés dans le lit du fleuve et cachés sous l’eau. Instruit de ces dispositions par des prisonniers et des transfuges, César envoya en avant la cavalerie, qu’il fit immédiatement suivre par les légions. Les soldats s’y portèrent avec tant d’ardeur et d’impétuosité, quoique leur tête seule fût hors de l’eau, que les ennemis ne pouvant soutenir le choc des légions et de la cavalerie, abandonnèrent le rivage et prirent la fuite.

XIX. Cassivellaunos, comme nous l’avons dit plus haut, désespérant de nous vaincre en bataille rangée, renvoya la plus grande partie de ses troupes, ne garda guère que quatre mille hommes montés sur des chars, et se borna à observer notre marche, se tenant à quelque distance de notre route, se cachant dans les lieux de difficile accès et dans les bois, faisant retirer dans les forêts le bétail et les habitants des pays par lesquels il savait que nous devions passer. Puis, lorsque nos cavaliers s’aventuraient dans des campagnes éloignées pour fourrager et butiner, il sortait des bois avec ses chariots armés, par tous les chemins et sentiers qui lui étaient bien connus, et mettait en grand péril notre cavalerie, que la crainte de ces attaques empêchait de se répandre au loin. Il ne restait à César d’autre parti à prendre que de ne plus permettre à la cavalerie de trop s’éloigner des légions, et que de porter la dévastation et l’incendie aussi loin que pouvaient le permettre la fatigue et la marche des légionnaires.

XX. Cependant des députés sont envoyés à César par les Trinobantes[1], l’un des plus puissants peuples de ce pays, patrie du jeune Mandubracios, qui s’était mis sous la protection de César (3), et était venu en Gaule se réfugier près de lui, afin

  1. Peuple du Middlessex.