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Qui de cent temples animés
Cachent la richesse adorable.
C’est dans ce chaste paradis
Que règne, en un trône de lis,
DeLa Virginité sainte ;
C’est là que mille anges mortels
DeD’une éternelle plainte
Gémissent au pied des autels.

Sacrés palais de l’innocence,
Astres vivants, chœurs glorieux,
Qui faites voir de nouveaux cieux
Dans ces demeures du silence,
Non, ma plume n’entreprend pas
De tracer ici vos combats,
DeVos jeûnes et vos veilles ;
Il faut, pour en bien révérer
DeLes augustes merveilles,
Et les taire et les adorer.

Il quitta Port-Royal après trois ans de séjour, et vint faire sa logique au collége d’Harcourt à Paris. Les impressions pieuses et sévères qu’il avait reçues de ses premiers maîtres s’affaiblirent par degrés dans le monde nouveau où il se trouva entraîné. Ses liaisons avec des jeunes gens aimables et dissipés, avec l’abbé Le Vasseur, avec La Fontaine qu’il connut dès ce temps-là, le mirent plus que jamais en goût de poésie, de romans et de théâtre. Il faisait des sonnets galants en se cachant de Port-Royal et des jansénistes, qui lui envoyaient lettres sur lettres, avec menaces d’anathème. On le voit, dès 1660, en relation avec les comédiens du Marais au sujet d’une pièce que nous ne connaissons pas. Son ode aux Nymphes de la Seine pour le mariage du roi était remise à Chapelain, qui la recevait avec la plus grande bonté du monde, et, tout malade qu’il était, la retenait trois jours, y faisant des remarques par écrit : la plus considérable de ces remarques portait sur les Tritons, qui n’ont jamais logé dans les fleuves,