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PENSÉES D’AOÛT.

Des promesses : « Du moins tu priras bien pour nous, »
Disait-elle ; et l’enfant que ce mot encourage :
« Je prirai que toujours vous ayez de l’ouvrage, »
Dans son espoir, ainsi, ne séparant jamais
Ce que sa mère dit le plus grand des bienfaits !
Cri naïf : De l’ouvrage ! éclair qui nous révèle
Des deux antiques parts la querelle éternelle,
Le travail, le loisir, deux fils du genre humain !
Ici, dans la prison, ils se touchaient la main :
Au front de cet enfant, un baiser d’alliance,
Un arc-en-ciel léger disait que confiance,
Reconnaissance, amour, ce qui peut aplanir,
Viendrait encore en aide au sévère avenir.
— « Pour ma sœur que voilà, souffrante, Enfant, demande,
« Demande la santé, tant que Dieu la lui rende. »
— « Oh ! vous l’aurez, dit-il (et son accent surtout
« S’y mêlait), vous l’aurez ! vous en aurez beaucoup ! »
— Et l’enfant et la mère ont depuis deux amies.

L’autre trait qui me touche, et qu’aux âmes unies,
Simples et de silence, aux doux cœurs égarés,
À tout ce qui connait le temple et ses degrés,
À tous ceux qui priaient à douze ans à la messe,
Et qui pleurent parfois le Dieu de leur jeunesse,
J’offre en simplicité, regrettant et priant.
Ce trait vient de l’hospice où de Chateaubriand
Le vieux nom glorieux s’avoisine au portique,
Comme auprès d’une croix un chêne druidique[1].
Un saint prêtre en ces murs et dans ce parc heureux,
Parmi les jeunes plants et les jets vigoureux
Qui, sur ces fronts humains dépouillés par l’orage,
Assemblent chaque été plus d’oiseaux et d’ombrage,

  1. L’infirmerie de Marie-Thérèse fondée par madame de Chateaubriand.