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DE JOSEPH DELORME.


REFRAIN


Désert du cœur, en ces longues soirées
Qu’Automne amène à notre hiver sans fleur,
Que vous avez de peines ignorées,
De sourds appels, de plaintes égarées,
Désert du cœur !

Dans la jeunesse, alors que tout commence,
Avant d’aimer, l’impatiente ardeur
S’en prend au sort et parle d’inclémence ;
Alors aussi vous paraissez immense,
Désert du cœur !

On veut l’amour ; on croit le Ciel barbare ;
Tout l’avenir n’est qu’orage et rigueur ;
Et l’on demande à l’horizon avare
Quel infini du bonheur vous sépare,
Désert du cœur !

Illusion ! Courez, Jeunesse franche ;
Rien qu’à deux pas, c’est le buisson en fleur ;
Plus de désert ! — Mais à l’âge où tout penche,
Est-il encor buisson ou rose blanche,
Désert du cœur ?

Lenteur amère ! attente inconsolée !
Oh ! par de là ce sable au pli trompeur,
N’est-il donc plus de secrète vallée,
Quelque Vaucluse amoureuse et voilée,
Désert du cœur ?