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À LA PRINCESSE

le rappeler. — Aujourd’hui, Académie et Sénat, oh ! c’est trop. Mais demain, vendredi, je serai

    mon article Fauriel sur le poëte Manzoni, — tome IV des Portraits contemporains.)

    Villa-Reale-di-San-Lucio, près Caserte
    (Italie méridionale), 9 mai 1865

    « … Votre nomination avait été annoncée, il y a près d’un an, par les journaux italiens. Manzoni, que je voyais chaque jour à Milan (au mois de juillet dernier), me dit à cette occasion combien il vous aimait et combien il se félicitait de tout ce qui pourrait vous arriver d’heureux. Il vous était pour toujours reconnaissant, ajoutait-il, de la manière dont vous aviez parlé de lui ; il vous devait d’être connu en France sous un jour favorable. Il me disait tout cela à la campagne sous les beaux ombrages d’un parc qu’il a planté lui-même, il y a soixante ans. Il me parla aussi beaucoup de M. Fauriel ce jour-là et aussi du philosophe (M. Cousin), à qui il en veut un peu de ne pas être meilleur Italien à l’heure qu’il est, après l’avoir vu si fougueux pour la même cause en 1821. Manzoni est resté immuable ; il veut la liberté et l’unité italienne complètes. Quel grand esprit et quelle admirable tête de vieillard ! La conversation revint sur votre compte pendant le dîner. « Si vous avez occasion d’écrire à M. Sainte-Beuve, me dit-il, ne manquez pas de lui répéter mes sentiments pour lui et la joie que j’aurais de le voir et de le recevoir ici. » Je voulais vous écrire tout cela à cette époque, en vous félicitant de votre nomination au Sénat ; mais les journaux la démentirent quelques jours après. Cependant, désirant que les paroles de Manzoni vous parvinssent, je les adressai à M. Camille Doucet pour vous les lire, et j’espère qu’il n’y aura pas manqué. »