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absolument nécessaires. Le Conservatoire de musique est très-bien choisi. L’École de médecine est un bon centre également. Je n’ai pas à discuter ces détails, mais le choix des lieux est de toute importance. Les directeurs des établissements publics mettent souvent peu de bonne volonté à accueillir les Lectures ; c’est au Gouvernement, de qui ils dépendent, de vaincre ces résistances peu libérales[1].

Il y a un symptôme général à constater, et dont on serait coupable de ne pas tenir compte : l’esprit de la classe ouvrière à Paris s’améliore. Si l’on me demande ce que j’entends par ce mot, je répondrai que j’entends cette amélioration dans un sens qui ne saurait être contesté par les honnêtes gens d’aucun parti et d’aucune nuance d’opinion. S’améliorer, pour la classe laborieuse, ce n’est pas, selon moi, avoir telle ou telle idée politique, incliner vers tel ou tel point de vue social (j’admets à cet égard bien des dissidences), c’est tout simplement comprendre qu’on s’est trompé en comptant sur d’autres voies que celle du travail régulier ; c’est rentrer dans cette voie en désirant tout ce qui peut la raffermir et la féconder. Quand la majeure partie d’une population en est là, et que les violents sont avertis peu à peu de s’isoler de la masse et de s’en séparer, je dis que la masse s’améliore, et c’est le moment pour les politiques prévoyants d’agir sur elle par des moyens honnêtes, moraux, sympathiques. Les Lectures du soir, dans leur cadre modeste, sont tout cela. Les hommes

  1. La convenance des heures n’est pas moins importante que le choix des lieux. Ainsi, il est regrettable qu’au lycée Charlemagne M. Just Olivier soit réduit à commencer à sept heures du soir, c’est-à-dire à une heure où les ouvriers ont à peine fini leur journée. La meilleure heure est le soir, de huit à neuf heures un quart.