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Que de le voir traisner ses beaux canons[1],
Ses pointcouppez[2] à cent sortes de noms,
Qui, sous l’amas de six rangs d’esguillettes[3]
Dont les fers d’or brillent comme paillettes,
À cent replis bouffent en s’eslevant
Sur le beau cuir apporté du levant[4] ;
Et pour marcher font qu’à jambe qui fauche
Il meut en cercle et la droite et la gauche,
Non sans hazard de maint casse-museau,
Peine bien deue au miste damoiseau !
Bref, qui voudroit esplucher bien nos modes,

  1. Le canon étoit un ornement de toile rond, large, bordé de dentelle, qui, attaché au dessous du genou, descendoit jusqu’à la moitié de la jambe. Furetière, dans son Dictionnaire, s’en moque, et prétend que la mode des canons est de l’invention des cagneux. — Molière s’est raillé aussi

    De ces larges canons où, comme en des entraves,
    On met tous les matins ses deux jambes esclaves.

    « Quant aux canons de linge qu’on porte au dessus (des bottes), nous les approuvons bien dans leur simplicité quand ils sont fort larges et de toile baptiste bien empesée, quoyque l’on ait dit que cela ressembloit à des lanternes de papier, et qu’une lingère du palais s’en servit ainsi un soir, mettant sa chandelle au milieu pour la garder du vent. Afin de les orner davantage, nous voulons aussi que d’ordinaire il y ait double et triple rang de toile soit de baptiste, soit de Hollande, et d’ailleurs ce sera mieux encore s’il y peut avoir deux ou trois rangs de points de Gènes, ce qui accompagnera le jabot, qui sera de même parure. » (Les Loix de la galanterie, dans le Nouveau recueil des pièces les plus agréables de ce temps, Paris, Sercy, 1644, in-8, p. 22.)

  2. Sorte de dentelle à jour.
  3. « Le cordon et les esguillettes s’appellent la petite-oye. » (Loix de la galanterie.) — Les aiguillettes étoient des cordons ferrés aux deux bouts, parfois avec des ferrets d’or.
  4. Les bottes des galands étoient faites de ce cuir.