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Son bras, d’un mouvement adroit,
Fend devant nous l’onde azurine :
C’est la Calioppe marine
Que j’ay choisie en cet endroit.
Ses sœurs, ces aymables pucelles,
Sortant de l’eau jusqu’aux aisselles,
Chantent nostre futur bonheur,
Et font à nos moindres nacelles
Quelque caresse ou quelque honneur.

L’une, avecques ses beaux yeux vers,
Sousrit, se hausse et me regarde ;
L’autre, ensemble douce et hagarde,
Plonge ses tresors descouvers ;
L’autre, d’une brillante gloire,
Fait flotter sur le mol yvoire
L’or de son poil delicieux :
Et l’autre, de sa tresse noire,
Couronne son chef gracieux.

Les Tritons, aussi mal taillez,
Qu’elles sont cointes[1] et jolies,
De mille agreables folies
Chatouillent mes sens esveillez ;
Là, l’un, qui de souffler se tue,
Embauche une conque tortue
Au lieu d’un cornet à bouquin,
Tandis que l’autre s’esvertue
À faire icy le Harlequin.

Ils nagent, ils dancent autour
Des belles filles de Nerée ;
À voir leur façon alterée,

  1. Vieux mot depuis long-temps hors d’usage à l’époque de Saint-Amant. — Coint, cointe, comptus, bien ajusté, bien orné.