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S’eslevant icy dans ma teste,
Rompe nostre premier assaut,
Au second chocq où l’on s’appreste
Les Veillacques[1] feront le saut.

En cet orage furieux,
ll semble desjà que Neptune
Tasche d’exciter la fortune
Contre un dessein si glorieux ;
Ou que, pour faire au ciel la guerre,
Les Tritons, faschez du tonnerre,
Entassans monts sur monts flotans,
Vueillent qu’aussi bien que la terre
La mer fasse voir des Titans.

Ha ! le coup de vent est passé ;
Je voy desjà les ondes calmes,
Et nous allons cueillir les palmes
Du hardy projet commencé :
Desjà Henry, ce brave prince,
Contre Miguel[2], qui les dents grince,
Fait voguer la mort et l’effroy ;
Et jamais la sainte province
Ne vit mieux faire à Godefroy[3].

Il vaincroit un autre Ilion :
C’est un Roland, c’est un Hercule ;
L’Espagnol devant luy recule
Comme un chien devant un lion.
Au seul aspect de sa chalouppe
Qui le sel liquide entre-couppe,

  1. Veillacques, Espagnols. (S.-A.)
  2. Don Miguel Perez, gouverneur de l’isle Sainte-Marguerite pour le roy d’Espagne. (S.-A.)
  3. La Terre-Sainte, conquise par Godefroy de Bouillon, un des ancêtres du comte d’Harcourt.