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Il n’avoit pas été plus heureux en Angleterre que Bois-Robert, lorsqu’il accompagna le duc et la duchesse de Chevreuse au mariage du prince de Galles, depuis Charles Ier, avec Henriette-Marie de France. Bois-Robert, dit crûment Tallemant des Réaux, n’étoit allé là que « pour y attraper quelque chose ». Il n’en rapporta rien qu’une maladie.

Ce ne fut pas son seul malheur : un jour qu’il étoit « panse pleine », qu’il « en tenoit un peu », on vola sa bourse pendant son sommeil, et, horresco referens ! « Bacchus trahit Saint-Amant ! »

Une autre fois, je ne sais quel maladroit petit barbier ou barberot, comme il l’appelle, « roy des vilains museaux », entreprit de l’écorcher sous nom de le raser. Grande colère, grand désespoir de Saint-Amant ! À la fin du Barberot, il s’écrie avec dépit :

Je pers tout en Angleterre,
Poil, nippes et liberté ;
J’y pers et temps et santé,
Qui vaut tout l’or de la terre ;
J’y perdy mon cœur, que prit
Un bel œil dont il s’eprit,
Sans espoir d’aucun remede ;
Et je croy, si Dieu ne m’ayde,
Qu’enfin j’y perdray l’esprit.

Bois-Robert n’eut jamais plus longue rancune contre le climat barbare qui l’exposa à tant de malencontres. Saint-Amant fit pour l’Angleterre ce qu’il avoit fait pour Rome : il composa un poème de l’Albion qui fait partie des manuscrits de la Bibliothèque impériale. C’est une attaque virulente contre les Anglois, et souvent si mordante qu’il n’osa pas la publier ; nous la donnons pour la première fois.

L’Albion, caprice héroï-comique, est dédié par l’auteur à Monseigneur le maréchal de Bassompierre ; il se compose de cent vingt et une stances de sept vers, et se termine par un c’est fait énergique, qui témoigne du plaisir avec lequel l’auteur a terminé son ouvrage, ou au moins le manuscrit, si nettement exécuté, qu’il a fait, à