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Que je revy l’aspect du pourprix fortuné
Où comme en son Olimpe habite ma déesse.
Je m’arreste aussitost ; humble, je le carresse,
Puis à maint long soupir ayant lasché le cours,
Je luy tiens à part moy cet aymable discours :
Gentil effect de l’art, pompeuse architecture,
Qui receles en toy l’honneur de la nature,
Beau rocher où se voit le plus beau diamant
Que jamais le soleil ait fait en s’animant,
Céleste tabernacle, amoureux domicile,
Ton glorieux accez me sera-t’il facile ?
Et sans que mon espoir ait trop de vanité,
Puis-je croire qu’un jour cette divinité,
Qui fait dans ton enclos sa belle résidence,
Souffre enfin que ma bouche y mette en évidence,
Devant son clair autel, la violente ardeur
Dont ma foy se dispose à servir sa grandeur ?
Mes vœux atteindront-ils au bonheur de luy plaire ?
Oseray-je prétendre à quelque doux salaire,
Que je borne au souhait de sa compassion,
Quand elle connoistra ma pure affection,
Parmy les mouvemens que dans nos cœurs excite
L’impetueux effort d’un penser illicite,
Et parmy les ennuis qui me sont préparez,
Outre les maux presens et les maux endurez !
Ouy, les maux endurez : je les veux mettre en conte,
Car combien que leur terme à peu de chose monte,
Ils m’ont semblé dejà si longs et si cuisans,
Qu’ils me font reputer les heures pour des ans.
Au bout de ces propos, enfans d’un beau martire,
Devers l’hôtel de Rets à pas forcez je tire,
Et, trouvant mon cher duc, mon maistre sans pareil,
Qui fait à son plaisir mon sort pasle ou vermeil,
Je luy dis à l’écart le tourment qui m’oppresse,
Et comme il semble à voir que par une maistresse