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Je fus tout yeux et tout oreilles ;
J’admiray leur maintien, leur taille et leur façon ;
Mais dessus toutes ces merveilles,
Je demeuray charmé d’entendre leur chançon.

Et combien que mon souvenir
En ait sceu fort peu retenir,
Tant s’en faut qu’il la sçache entiere,
Je sçay bien toutefois que vos sainctes amours
En estoient l’illustre matiere,
Et que vous seulement en formiez le discours.

Je sçay bien qu’on n’ouyt jamais
Sur la montagne à deux sommets
Des paroles mieux ordonnées,
Et que jamais son prince, en qui loge le soing
De vanter les grands hymenées,
Pour un plus doux concert ne mit l’archet au poing.

Tantost, publiant les vertus
Dont vos esprits sont revestus,
Elles faisoient crever l’envie ;
Tantost elles chantoient les plaisirs innocens
Que vous goustez en cette vie,
Et tantost vos ardeurs brilloient en leurs accens.

Là, s’estendant sur vos attraits,
Elles animoient deux portraits
À qui tout œil doit rendre hommage :
L’auguste front de l’un representoit un dieu,
Et l’autre estoit la vraye image
De la majesté mesme assise en un beau lieu.

De quel air estoit là depeint
Le vif esclat de vostre teint,
Princesse d’immortelle race !
Que n’y disoit-on point de vos yeux nompareils,