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Cet arbre qui par un bon-heur
À Hotland parfois à l’honneur
De vous fournir de siege et d’ombre,
Meu d’un certain esprit qui, le faisant branler,
Esgayoit son fueillage sombre,
Tout ravy, l’autre jour me sembloit en parler.

C’estoit sur le poinct que la nuit,
Poursuivant l’astre qu’elle fuit,
Recommence à tendre ses voiles,
Et que les vers luisans, vrais flambeaux des guerets,
Brillant à l’envy des estoiles,
Esclairent aux fourmis à derober Cerès.

J’estois sorty seul pour resver,
Taschant à part moy d’eslever
Quelque ouvrage à vostre louange,
Quand sous cet arbre heureux, où mes pas s’adressoient,
Touché d’une douceur estrange,
Je vy paroistre en rond des vierges qui dançoient.

À leur riche habit degoutant
Je les jugeay tout à l’instant
Pour les nymphes de la Tamise,
Qui, pour voir cette place où vous aviez esté,
Sous une licence permise,
Dans son lit de roseaux leur pere avoient quitté.

Saisy de crainte et de respect
À l’abord d’un si grave aspect,
Je devins comme une statue ;
Mais enfin mon desir, puissant et curieux,
Gagnant mon ame combatue,
Sur ma timidité resta victorieux.

Lors, m’aprochant de ces beautez,
Ou plustost de ces deitez,