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Helas ! de te quitter je creve ;
J’esperois qu’un jour à venir,
Puis qu’aussi bien tout doit finir,
Apres avoir fait à l’extresme
Un tour de pays de moy-mesme,
J’aurais l’honneur, sur vostre bort,
De voir force gens à ma mort ;
Au lieu qu’au sentier que j’empoigne
Devant que de r’estre en Gascongne,
Je cours l’hazard d’au coing d’un bois
Jetter seul des ultim’ abbois,
Accravanté de lassitude,
De trop jeusner, de marritude,
Et qui plus est, loing des beaux yeux
Où logent mon pis et mon mieux.
Ha ! beaux yeux ! ha ! docte maistresse !
Pour qui mon pie marche en detresse,
Gente Perrette[1], mon soucy,
À qui, jeunet, d’amour transy,
J’abnndonnois moy-mesme en proye
Mon cœur, mon poulmon et mon foye,
Mon corps de l’un à l’autre bout,
Trippes, boudins, et merde et tout :
Helas ! faut-il que je te quitte !
Ouy, l’ordonnance en est prescrite.
Je voudrois bien que non, mais quoy !
Necessité n’a point de loy.
L’horrible misere, laquelle

  1. Tallemant prétend que Saint-Amant, dans ce passage, a eu en vue Mlle de Gournay, que son amour pour notre vieux langage faisoit tourner alors en ridicule. — Son livre Des advis a une véritable valeur dans toute la partie purement grammaticale ; ses traductions de Virgile sont tiraillée et pénibles. — (Voy. Tallemant.)