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Le Melon.

Et ne fait boire à ses regents,
Que la sueur des sottes gents,
Qui pour un zest, pour une paille,
Bouttant jusqu’à l’ultime maille,
Apprennent à leurs hoirs enfin
Que cil qui plaide est moult peu fin.
Quant à toy, gros Louvre effroyable,
Pour adieu je te donne au diable,
Le roy dehors, cela s’entant,
Et les reynes, qui valent tant.
Ouy, de bien bon cœur je t’y donne,
Je te dis moy-mesme en personne,
Pour les niches, pour les tourmens
Que dans tous tes departemens
On m’a faits depuis tant d’années,

    anciens registres du parlement : Non deliberatur donec solvantur species — pas d’épices, pas de jugement. Furetière nous apprend que l’on donnoit le nom d’épices aux salaires que les juges se taxoient en argent au bas des jugements, pour leur peine d’avoir travaillé au rapport et à la révision des procès par écrit. D’abord il n’y avoit que les juges pédanés (juges de village qui rendoient leurs jugements stantes in pedibus) à recevoir des épices, parcequ’ils n’avoient point de gages. À la fin du xviie siècle, on payoit les épices en écus quarts de trois livres quatre sous ; mais, à cette époque, certains magistrats avoient bien compris la honte de cette coutume. Ainsi M. Portail, conseiller au parlement de Paris, jetoit par la fenêtre du grenier, où, comme Dandin son portrait, il avoit huché son cabinet (voy. Tallemant), les présents que lui apportoient les plaideurs. Les poètes attaquèrent le même abus. Furetière voit au milieu d’un marché une statue de la Justice, et il fait cette épigramme :

    — D’où vient qu’on a tant approché
    Cette Justice du marché ?
    — Rien n’est plus facile à comprendre :
    C’est pour montrer qu’elle est à vendre.

    Le poète de Cailly (d’Aceilly), de son côté, a fait plusieurs épigrammes sur le même sujet.