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Le Melon.

Après que Jupiter, avecque son tonnerre,
Eut fait la petarrade aux enfans de la terre,
Et que les dieux, lassez, revindrent du combat
Où Pan perdit ses gands, Apollon son rabat,
Mars l’un de ses souliers, Pallas une manchette,
Hercule, par un trou, l’argent de sa pochette,
Mercure une jartiere et Bacchus son cordon,
Pour s’estre, dans les coups, jettez à l’abandon ;
Après, dis-je, ce chocq, où l’asne de Silene,
Aux plus mauvais garçons fit enfin perdre haleine,
Par l’extrême frayeur que sa voix leur donna,
De quoy le ciel fremit et l’enfer bourdonna ;
On dit qu’il fut conclu qu’en signe de victoire
Tout le reste du jour se passeroit à boire,
Et que chacun d’entr’eux, fournissant au banquet,
Apporterait son mets troussé comme un pacquet.
Soudain, de tous costez sur l’Olympe se virent
Plats deçà, plats delà, que les Nymphes servirent,
Le bras nud jusqu’au coude et le sein descouvert,
Orné de quelque fleur avec un peu de vert.
Ce dieu qui des premiers autorisa l’inceste,
Devant qui les plus grands de la troupe celeste,
Plus petits que cirons, de peur de le fascher
N’oseroient seulement ny tousser ny cracher ;
L’audacieux Jupin, pour commencer la dance,
Et presenter à l’œil dequoy garnir la pance,
Fit apporter pour soy, dans un bassin de pris,
Quantité de gibbier que son aigle avoit pris.
La superbe Junon, qui dans une charrette
Que des pans font rouler, fait souvent sa retrette
En l’empire incertain des animaux volans,
Prit de la main d’Iris un bouquet d’ortolans
Qui fleurissoit de graisse, et convioit la bouche
À luy donner des dents une prompte escarmouche,
Durant qu’il estoit chaud, et qu’il s’en exhaloit