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LE FROMAGE.


Assis sur le bord d’un chantier
Avec des gens de mon mestier,
C’est-à-dire avec une trouppe
Qui ne jure que par la couppe,
Je m’escrie, en laschant un rot :
Beny soit l’excellent Bilot !
Il nous a donné d’un fromage
À qui l’on doit bien rendre hommage.
Ô Dieu ! quel manger precieux !
Quel goust rare et delicieux !
Qu’au prix de luy ma fantaisie
Incague la saincte ambroisie !
Ô doux cottignac de Baccus !
Fromage, que tu vaux d’escus !
Je veux que ta seule memoire
Me provoque à jamais à boire.
À genoux, enfans debauchez,
Chers confidents de mes pechez,
Sus ! qu’à plein gosier on s’escrie :
Beny soit le terroir de Brie[1] !
Beny soit son plaisant aspect !
Qu’on n’en parle qu’avec respect !
Que ses fertiles pasturages
Soient à jamais exempts d’orages !
Que Flore, avec ses beaux atours,
Exerçant mille amoureux tours

  1. Le fromage de Brie, comme le fromage de Pont-l’Evêque, étoit sec, dur et de garde, dit Furetière. Le Dict. de Trévoux donne une liste curieuse de fromages.