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SONNET.


Doux tourment des esprits, amoureuse manie
Qui trouble mon repos avec tant de plaisir,
Ne me donne jamais un moment de loisir ;
J’aime bien à souffrir dessous ta tyrannie.

Rens en moy de ton feu la grandeur infinie,
Et, gouvernant mes sens, dont tu te viens saisir,
Fay que rien desormais ne vive en mon desir
Que l’adorable objet de la chaste Uranie.

Au seul bruit de son nom parvenu jusqu’à moy,
Mon ame luy consacre une eternelle foy,
Sur qui l’honneur s’eleve et mon espoir se fonde.

Je l’aime sans la voir, comme on aime les dieux,
Et tiens plus de l’Amour qu’homme qui soit au monde,
Puis que non plus que luy je ne me sers point d’yeux.



SONNET.


Jamais rien n’approcha de mon heureux destin :
J’adore une beauté qui n’a point de pareille,
Soit pour enchanter l’œil, soit pour ravir l’oreille,
Ou pour faire d’un cœur un amoureux butin.

Son visage est plus frais qu’une rose au matin,
Quand au chant des oiseaux son odeur se réveille ;
Elle remplit mes sens de gloire et de merveille,
Et me fait mespriser la bergere Catin.