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Au nombre de nos forts esprits ;
Que ces misérables avares
À leur endroit mesme barbares,
Qui bien moins hommes qu’animaux
Se donnent tous les jours les maux
Que dans les biens dont ils se privent
Ils craignent qui ne leur arrivent,
Et se laissent mourir de faim
De peur de n’avoir plus de pain ;
Que ces mines de secrétaires,
Ces graves discoureurs d’affaires,
Qui, sans adveu du potentat,
Trenchent des ministres d’estat ;
Que ces vieilles rattes-pourries,
Ces âmes qui ne sont nourries
Que d’un chagrin contredisant
À tout ce qu’on fait de plaisant ;
Que les ennemis des sciences,
Que les perfides consciences,
Que les yvrongnes querelleux,
Ny les ignorans scrupuleux,
Ne viennent point, pour nos supplices
Troubler en ce lieu les délices
Que l’on y gouste tous les jours ;
Bref, pour accomplir ce discours,
Que le petit noble rustique
Avec son habit à l’antique,
Son corps mal fait, son sot maintien,
Et son ridicule entretien,
Ne se présente en nulle sorte
À cette vénérable porte,
Qu’il ferait sauter hors des gonds,
S’il ne veut que par mille bonds
On luy fasse dans une berne