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Tantost nous voyons un Satyre,
Assis à l’ombre d’un ormeau,
Faire plaindre son chalumeau
De son agreable martyre ;
Tantost, dans un bois écarté
Où n’entre qu’un peu de clarté,
Nous visitions la Solitude ;
Et, trouvans le Repos qui lui faisoit la cour,
Nous chassions toute inquietude,
De peur de les troubler en leur paisible amour.

Là, sous un mirthe que les fées
Respectent comme un arbre saint,
Où Venus elle-mesme a peint
Ses mysteres et ses trofées,
Nous faisions des vœux solemnels
Que nos feux seroient eternels,
Sans jamais amoindrir leur force ;
Puis, prestans le serment à Dieu nostre vainqueur,
Nous l’ecrivions sur son escorce ;
Mais il estoit gravé bien mieux dans nostre cœur.

Tantost, feignant un peu de crainte,
Je disois à cette beauté,
Pour sonder sa fidelité,
Que son humeur estoit contrainte ;
Tantost, d’un visage mourant,
Je lui tenois en souspirant
Ces propos de glace et de flame :
Oseroy-je esperer, ô miracle des cieux !
D’estre aussi bien dedans ton ame
Comme en te regardant je me voy dans tes yeux ?

Lors elle disoit toute emeue,
En m’accusant de peu de foy :
Lysis, ton image est en moy