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Le destin est racourcy :
Car, ayant commis le crime,
La raison veut qu’elle estime
Qu’elle en est punie aussi.

Est-ce vous donc, ô chère Ombre ?
Dit-elle en ouvrant les yeux.
Mais quoi ! dans l’Averne sombre
Voit-on la clarté des cieux ?
Je m’abuse, poursuit-elle.
Ô dieux ! sous vostre tutelle
Mes jours ont donc esté mis ?
Il est donc vray que la vie
Ne m’a point esté ravie,
Et que vous m’estes amis ?

Ouy, ma fille, il le faut croire,
Dit la mère en l’embrassant ;
Vous en devez rendre gloire
À leur secours tout puissant.
Un d’entre eux, en forme d’homme,
Que tout l’univers renomme,
À daigné vous assister :
C’est celuy qui sur la nue,
Par une route incognue,
Nous est venu visiter.

D’une valeur sans seconde
Le Monstre il a combattu ;
Ce cruel tyran de l’onde
À fleschi sous sa vertu,
Sous l’effort de son espée
Son audace est dissipée,
Rien ne l’en a garanty ;
Et mesme on croit que Neptune,
Touché de vostre infortune,
À sa mort a consenty.