les souvenirs de Cirey et de la marquise sont inséparables de tout ce qui touche aux études scientifiques de Voltaire.
La marquise et Voltaire se trouvaient en 1747 à Lunéville, où se tenait la cour du roi Stanislas. C’est là que madame du Châtelet fit la connaissance du marquis de Saint-Lambert, capitaine aux gardes lorraines, officier brillant et spirituel. Treize années de liaison avec Voltaire avaient amené quelque langueur dans l’affection d’abord si ardente de la marquise ; peut-être avait-elle été un peu refroidie par la tiédeur même de son amant, qui mettait dans ses tragédies le plus vif de son tempérament[1] et qui avait d’ailleurs cinquante-trois ans bien sonnés. Saint-Lambert fut-il pressant, irrésistible ? Bref, elle prit feu pour lui, et elle se jeta dans ce nouvel attachement avec tout l’entrain d’une passion née sur le tard : la marquise avait elle-même ses quarante et un ans.
Voltaire ne vit rien d’abord ou fit semblant de ne rien voir jusqu’à ce qu’un soir, à Cirey, pour être entré trop brusquement dans la chambre où se tenaient les deux nouveaux amants, force lui fut d’éclater. Il se répand en injures, insulte Saint-Lambert, qui se met à sa disposition, puis il va s’enfermer chez lui, donnant l’ordre à son valet de tout préparer pour son départ dès le lendemain matin.
Cependant madame du Châtelet, le premier moment de surprise passé, monte à l’appartement de Voltaire. Il s’était mis au lit ; elle s’assied à son chevet, et alors commence une
- ↑ Déjà, en 1733, Voltaire, écrivant à son ami Cideville, disait de lui-même :
… Mon cœur à l’amour quelquefois s’abandonne ;
J’ai bien peu de tempérament ;
Mais ma maîtresse me pardonne,
Et je l’aime plus tendrement.