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LES COQUILLES FOSSILES.

a très-peu dont l’origine maritime soit incontestable. Les débris que l’on rencontre ne proviennent-ils pas de colimaçons, de moules, de crustacés ou de mollusques de rivière ? Il a fait chercher des fragments de coquillages marins sur le mont Saint-Gothard, sur le Saint-Bernard, dans les montagnes de la Tarentaise : on n’en a pas découvert. Un seul physicien lui a écrit qu’il a trouvé quelques écailles d’huîtres pétrifiées vers le mont Cenis. Ces huîtres paraissent authentiques ; mais « est-ce une idée tout à fait romanesque de faire réflexion sur la foule innombrable de pèlerins qui partaient à pied de toutes les provinces pour aller à Rome par le mont Cenis, et qui portaient des coquilles à leurs bonnets ? » Ces coquilles de mer ont donc été perdues ou jetées par des pèlerins, et « une huître près du mont Cenis ne prouve pas que l’Océan indien ait enveloppé toutes les terres de notre hémisphère. » Et d’ailleurs, sans recourir aux pèlerins, n’y a-t-il pas d’autres causes qui peuvent déplacer des coquilles d’huîtres ? « Il n’y a pas longtemps, dit-il, que dans un de mes champs, à cent cinquante lieues des côtes de Normandie, un laboureur déterra vingt-quatre douzaines d’huîtres ; on cria miracle : c’étaient des huîtres qu’on m’avait envoyées de Dieppe il y avait trois ans. Je suis de l’avis de l’Homme aux quarante écus, qui dit que des médailles romaines trouvées au fond d’une cave à six cents lieues de Rome ne prouvent pas qu’elles aient été fabriquées dans cette cave. »

On parlait beaucoup du falun de Touraine, sur lequel l’attention avait été autrefois appelée par Bernard Palissy ; on prétendait qu’il existait en Touraine une masse de 130 millions de toises cubiques d’un terrain presque entièrement composé de coquilles de mer intactes ou brisées, sans mélange de matières étrangères. Certainement, s’il y avait à quarante lieues de la