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Née douce, dévote et vertueuse, elle était loin d’imaginer que les principes que nous inculquait mon père, dussent faire un jour notre bonheur ; et pleine de ses petites idées, elle entrava, tant qu’elle le put, tous les projets de son mari, qui finissant néanmoins par se moquer d’elle, ne s’en tint seulement pas à détruire en nous tous les principes de religion, mais anéantit même tous ceux de la morale. Les bases les plus sacrées de la loi naturelle, furent également pulvérisées ; et cet aimable père, voulant que nous devinssions aussi philosophes que lui, ne négligea rien de tout ce qui pouvait nous rendre impassibles aux préjugés, comme aux remords ; afin que de pareilles maximes ne fussent pas dans le cas d’être contrariées, il avait l’attention de nous tenir dans une solitude profonde. Un seul de ses amis, et la famille de cet ami, venaient parfois adoucir cette retraite ; et je dois, pour l’intelligence de mon récit, peindre un moment ce digne ami.

Monsieur de Breval, âgé de quarante-cinq ans, presqu’aussi riche que mon père, avait, comme lui, une épouse jeune, vertueuse, sensible, et comme lui des enfans