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volcans de cette nature toujours criminelle, plongent l’ame dans un trouble qui la rend capable des grandes actions et des passions tumultueuses ; ceci c’est nous, dis-je à mes amies, et les gens vertueux ressemblent à ces tristes campagnes du Piémont, dont l’uniformité nous désolait. En examinant bien cet étonnant pays, il semble qu’il n’ait été qu’un volcan autrefois ; à peine y voit-on un seul endroit qui ne porte l’emblème d’un boulversement. Elle a donc quelquefois des torts cette bisarre nature… et l’on ne veut pas que nous l’imitions : quelle injustice ! La Solfatarre que nous parcourûmes semble être la preuve de ce que je dis.

Nous arrivâmes à Pouzzols, ayant perpétuellement sous nos yeux les tableaux les plus variés et les plus pittoresques. C’est de là qu’on découvre la jolie petite isle de Nicette, où Brutus se retira après avoir tué César. Quel délicieux séjour pour le genre de voluptés que nous chérissons ; on serait là comme au bout de la terre ; un voile impénétrable déguiserait, à tous les yeux, la secrette horreur qu’on y voudrait commettre, et rien n’aiguise l’imagination, rien ne l’enflâme comme le silence et le mystère.