Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 9, 1797.djvu/205

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

moins que si elle regrette peu le Hongrois, c’est parce qu’elle n’aime que moi dans le monde. Chère et triste enfant, répondis-je, tu n’es guère payée de retour : je ne puis souffrir les femmes, mon ange, je te l’ai dit, puis déculotant Carle-Son à ses yeux ; tiens, poursuivis-je, voilà comme sont faits les individus qui ont des droits à mes faveurs. Philogone rougit, et verse quelques larmes. Et comment donc, continuai-je, pourrais-tu m’aimer, après le crime que tu m’as vu commettre ? — Ce crime est affreux sans doute ; mais est-on maîtresse de son cœur ? O monsieur, vous m’assassineriez moi-même… je vous aimerais encore : et sur cela la conversation s’engagea. La vieille femme s’était rapprochée de nous sans affectation, et sans avoir l’air de nous entendre, elle ne perdait rien de ce que nous disions. Que faisiez-vous donc chez Calni, demandai-je à Philogone ? Cette protection me semble intéressée ; il y avait de l’amour dans tout cela ? Quand on ne tient point par le lien du sang, à une jeune fille comme vous, il est rare qu’on la protège sans avoir le dessein d’en jouir. Le plus pur intérêt, monsieur, me répondit Philogone, guidait les senti-