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D. Et comment voyez-vous la religion dans cela !

R. Comme le premier ressort de la tyrannie, celui que le despote doit toujours mouvoir, quand il veut étayer son trône : le flambeau de la superstition fut toujours l’aurore du despotisme, et c’est toujours avec des fers bénis, que le tyran assouplit le peuple.

D. Vous nous exhortez donc à en faire usage ?

R. Oui, certes : si vous voulez régner, qu’un Dieu parle pour vous, et les hommes vous obéiront. Quand sa foudre tenue dans vos mains, les aura fait trembler, vous aurez bientôt leurs richesses et leurs vies : persuadez-leur que toutes les infortunes qu’ils ont éprouvées sous le régime que vous voulez leur faire rejeter, ne viennent que de leur irréligion, et les faisant tomber aux pieds de la chimère que vous leur offrirez, ils serviront bientôt de marche-pied à votre ambition, à votre orgueil… à votre luxure.

D. Vous ne croyez donc pas en Dieu ?

R. Est-il un seul être raisonnable au monde qui puisse ajouter foi à de tels mensonges. La nature, toujours en mouvement, peut-elle avoir besoin d’un moteur ; je vou-