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plus d’énergie ; s’il fallait fuir ainsi, chaque fois que l’on commet un crime, on ne pourrait jamais s’établir nulle part : cesse de craindre, ma chère ; la nature qui desire les crimes, surveille ceux qui les commettent, et l’on est bien rarement puni d’avoir exécuté ses loix. J’ai des lettres pour tout ce que la Suède a de plus grand ; je vais les présenter, sois sûre qu’il ne sera pas une seule de ces nouvelles connaissances dont nous ne puissions recueillir quelques branches de crimes ; gardons-nous seulement d’échapper au sort heureux qui nous attend.

À mon arrivée en Suède, la capitale ainsi que tout le royaume se trouvait vivement agitée par deux partis puissans : l’un mécontent de la cour, brûlait d’en envahir le pouvoir, l’autre, celui de Gustave III, paraissait bien déterminé à tout sacrifier pour maintenir le despotisme sur le trône ; la cour, et tout ce qui y tenait, formait ce dernier parti. Le premier était composé du sénat et de quelques portions du militaire. L’instant d’un nouveau règne parut propice aux mécontens : on a meilleur marché d’une autorité naissante que d’un pouvoir affermi ; les sénateurs le sentirent, et projetèrent de ne rien