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la tête ; agir, déraisonner à l’aise, sans que personne vous trouble ou vous entende ; être sûre que deux pieds de terre vont couvrir à l’instant tous les désordres de votre imagination ; se dire : voilà un objet que la nature me livre pour en faire absolument tout ce que je voudrai ; je puis le briser, le brûler, le tourmenter, le rompre à ma guise ; il est à moi, rien ne peut le soustraire à son sort ; ah ! quels délices ! quels voluptueux égaremens ! et que n’entreprend-t-on point dans ce cas ? Ces réflexions faites, je me précipite sur Agnès ; elle était nue… évanouie… sans aucune défense ; j’étais troublée au point que mon existence entière n’avait plus d’action que dans le sentiment de ma fureur. O Juliette ! je me satisfis, et après trois heures des supplices les plus variés… les plus monstrueux, je rendis aux élémens cette masse, qui n’avait reçu de moi la vie, que pour être le funeste jouet de ma rage et de ma méchanceté.

Voilà, dis-je, une délicieuse action, et qui a dû te coûter bien du foutre. Non, me répondit Olimpe, je te l’ai dit, je n’avais point encore à ton exemple lié la volupté au crime ; un voile épais existait encore sur