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quieu, parce qu’elle mettrait toujours l’homme en crainte avec l’homme, et que nous ne serions jamais assurés de notre bien, de notre honneur et de notre vie. Mais quelle nécessité pour adopter ce misérable préjugé, de s’aveugler sur des vérités aussi grandes… aussi essentielles ! nous rendrait-il service, celui qui, nous voyant entrer dans une forêt où il aurait été attaqué par des voleurs, ne nous préviendrait pas des dangers qui peuvent nous environner. Oui, oui, osons dire aux hommes que la justice est une chimère, et que chaque individu n’a jamais que la sienne, osons le leur dire sans crainte : en le leur annonçant, et leur faisant sentir par-là tous les dangers de la vie humaine, nous les mettons à même de s’en garantir, et de s’armer à leur tour d’injustice, puisque ce n’est qu’en devenant aussi injustes, aussi vicieux que les autres, qu’ils pourront se mettre à l’abri de leurs piégesLa justice, poursuit Montesquieu, est un rapport de convenance qui se trouve réellement entre deux choses, quelque soit l’être qui les considère.

Est-il au monde un sophisme plus grand que celui-là ; jamais la justice ne fut un