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nous plaira d’exiger, pendant que la Dubois appaiſant nos ardeurs, fera brûler l’encens ſur les autels dont cette créature nous refuſe l’entrée. — Me mettre nue, m’écriai-je, oh ! Ciel, qu’exigez-vous ? Quand je ſerai livrée de cette maniere à vos regards, qui pourra me répondre… Mais Cœur-de-fer qui ne paraiſſait pas d’humeur à m’en accorder davantage ni à ſuſpendre ſes déſirs, m’invectiva en me frappant d’une manière ſi brutale, que je vis bien que l’obéiſſance était mon dernier lot. Il ſe plaça dans les mains de la Dubois, miſe par lui à peu près dans le même déſordre que le mien, & dès que je fus comme il déſirait, m’ayant fait mettre les bras à terre, ce qui me faiſoit reſſembler à une bête, la Dubois appaiſa ſes feux en approchant une eſpèce de monſtre poſitivement aux périſtiles de l’un & l’autre autel de la nature, en telle ſorte qu’à chaque ſecouſſe elle dût fortement frapper ces parties de ſa main pleine, comme le bélier jadis aux portes des villes aſſiégées. La violence des premieres attaques me fit reculer ; Cœur-de-fer en fureur, me menaça de traitemens plus durs, ſi je me ſouſtrayais à ceux-là ; la Dubois a ordre de redoubler, un de ces libertins contient mes épaules & m’empêche de chanceler ſous les ſaccades : elles deviennent tellement rudes que j’en ſuis meurtrie, & ſans pouvoir en éviter aucune. En vérité, dit Cœur-de-fer, en balbutiant, à ſa place j’aimerais mieux livrer les portes que de les voir ébranlées