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que je devais avoir pour un genre de crime d’où devait naître l’affluence des maux dont j’étais menacée ! Mais fallait-il m’en plaindre alors ? Non ſans doute ; à ſes excès je dus mon ſalut ; moins de débauche & j’étais une fille flétrie ; les feux de Dubourg s’éteignirent dans l’efferveſcence de ſes entrepriſes, le Ciel me vengea des offenſes où le monſtre allait ſe livrer, & la perte de ſes forces, avant le ſacrifice, me préſerva d’en être la victime.

Dubourg n’en devint que plus inſolent ; il m’accuſa des torts de ſa faibleſſe… voulut les réparer par de nouveaux outrages & des invectives encore plus mortifiantes ; il n’y eut rien qu’il ne me dit, rien qu’il ne tenta, rien que ſa perfide imagination, la dureté de ſon caractere & la dépravation de ſes mœurs ne lui fit entreprendre. Ma mal-adreſſe l’impatienta, j’étais loin de vouloir agir, c’était beaucoup que de me prêter, mes remords n’en ſont pas éteints… Cependant rien ne réuſſit, ma ſoumiſſion ceſſa de l’enflammer ; il eut beau paſſer ſucceſſivement de la tendreſſe à la rigueur… de l’eſclavage à la tyrannie… de l’air de la décence aux excès de la crapule, nous nous trouvames excédés l’un & l’autre, ſans qu’il pût heureuſement recouvrer ce qu’il fallait pour me porter de plus dangereuſes attaques. Il y renonça, me fit promettre de venir le trouver le lendemain, & pour m’y déterminer plus ſure-