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JUSTINE,
OU
LES MALHEURS
DE LA VERTU.



J’étais à ma ſeconde journée parfaitement calme ſur les craintes que j’avais eues d’abord d’être pourſuivie ; il faiſait une extrême chaleur, & ſuivant ma coutume économique, je m’étais écartée du chemin pour trouver un abri où je pusse faire un léger repas qui me mît en état d’attendre le soir. Un petit bouquet de bois sur la droite du chemin, au milieu duquel serpentait un ruisseau limpide, me parut propre à me rafraîchir. Désaltérée de cette eau pure et fraîche, nourrie d’un peu de pain, le dos appuyé contre un arbre, je laissais circuler dans mes veines un air pur et serein qui me délassait, qui calmait mes ſens. Là, je réfléchiſſais à cette fatalité presque ſans exemple qui, malgré les épines dont j’étais entourée dans la carriere de la vertu, me ramenait toujours, quoi qu’il en pût être, au

  Tome II.
A