J’étais à ma ſeconde journée parfaitement
calme ſur les craintes que j’avais eues d’abord
d’être pourſuivie ; il faiſait une extrême chaleur,
& ſuivant ma coutume économique, je m’étais
écartée du chemin pour trouver un abri où je
pusse faire un léger repas qui me mît en état
d’attendre le soir. Un petit bouquet de bois sur
la droite du chemin, au milieu duquel serpentait
un ruisseau limpide, me parut propre à me rafraîchir.
Désaltérée de cette eau pure et fraîche,
nourrie d’un peu de pain, le dos appuyé contre
un arbre, je laissais circuler dans mes veines un
air pur et serein qui me délassait, qui calmait
mes ſens. Là, je réfléchiſſais à cette fatalité presque
ſans exemple qui, malgré les épines dont
j’étais entourée dans la carriere de la vertu, me
ramenait toujours, quoi qu’il en pût être, au