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ISABELLE DE BAVIÈRE


tée par les Anglais même, qui lui disaient en face que Charles VII n’était pas le fils de son mari ; outragée par les Français qui semblaient vouloir la replonger sans cesse dans les flots de sang dont elle avait arrosé leur patrie, il ne lui restait plus que sa douleur… que son repentir ; et si les larmes de ce premier sentiment en calmaient un instant la rigueur, les serpents du second entrouvraient aussitôt les plaies.

Entre ces deux fléaux de la vie, on la voyait errer au fond de son triste palais, ne voulant s’abreuver que de tout ce qui pouvait faire couler ses pleurs avec plus d’amertume, ou redoubler ses remords avec plus de fureur. Souvent alors elle se faisait lire le procès de Jeanne d’Arc ; elle voulait surtout que l’on répétât le passage où cette pauvre fille, s’irritant des invectives lancées contre Charles VII, s’écriait à ses bourreaux avec l’accent du désespoir : Tourmentez mon malheureux corps ; mais n’insultez pas à mon roi, c’est pour lui que je meurs.

« Il était mon fils, ce roi, disait Isabelle, dans une sorte de délire effrayant ; c’était à moi de le chérir, c’était à moi de le défendre, et j’ai livré aux flammes celle qui l’aimait et qui mourait pour lui !… je suis un monstre indigne du jour. Ô furies de l’enfer ! avez-vous préparé pour moi des tour-