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ISABELLE DE BAVIÈRE


conduire dans les prisons de Paris, où la moitié périt de faim et de misère. Plusieurs de ces malheureux furent même écartelés sur la fausse imputation d’avoir coopéré à l’assassinat du duc de Bourgogne.

Comme Isabelle avait longtemps habité Melun, on ne douta pas que ce trait de férocité ne fût son ouvrage, pour se venger de quelques habitants de cette ville dont elle pouvait avoir à se plaindre. Ainsi cette femme aussi adroite que méchante, armant toujours Philippe contre les assassins de Jean, détournait néanmoins à son gré les effets de la vengeance de ce jeune prince, toutes les fois qu’ils pouvaient servir à la sienne.

Enfin, le monarque anglais, suivi de Charles VI, d’Isabelle et du duc de Bourgogne, firent leur entrée dans la capitale, où ils furent reçus avec tous les témoignages de distinction que pouvaient permettre le malheur des temps. Le bon citoyen de Paris frémissait de voir un monarque anglais s’emparer de sa ville ; et si quelques signes de consolation paraissaient en lui, ils naissaient de la joie de revoir son véritable souverain après une si longue absence : placé de cette manière entre la tendresse et la haine, les larmes versées sur celui qui faisait naître le premier sentiment se séchaient bientôt dès que les yeux qui les répandaient se tournaient un instant sur l’autre.