Page:Sade - Cahiers personnels, Adélaïde de Brunswick, Pauvert, 1966.djvu/413

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
393
ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK


princesse dans un billet qu’il signa de son sang. Adélaïde le baisa, le mit sur son cœur et partit pour cette sainte retraite où nous l’avons vue descendre sur la fin de ses voyages. Elle y arriva seule et à pied.

— Je reviens à vous, saint homme, dit-elle au père Urbain en l’embrassant ; vous voyez que je vous tiens la parole que je vous avais donnée.

Et après avoir passé quelques jours dans cette maison, elle annonça le désir d’y prendre le voile.

Elle demanda à l’abbesse la permission de faire elle-même décorer l’église comme elle voulait qu’elle le fût le jour de cette grande cérémonie… On y consentit.

Par ses ordres, tout est tendu de noir ; le tombeau de l’ancienne princesse de Saxe est ouvert ; vingt lampes brûlent autour. Un siège d’ébène est placé en face du tombeau.

Toute la communauté garnit les nefs latérales sans obstruer celle du milieu. Ces deux files de religieuses ont à leur tête, à droite. Urbain, à gauche la supérieure. Il est minuit.

L’accent douloureux et plaintif des cloches du couvent semble avertir le ciel du sacrifice qui se prépare. Les saintes cénobites, entièrement étendues sur la terre, entonnent le « de profundis » à voix basse… On dirait que ces organes sombres